Le Mahabharata, Jean Claude Carrière
"Jusqu'à la dernière limite, jusqu'au dernier de ses arguments, Krishna voulait sauvegarder la paix, empêcher cette guerre qui menaçait toutes les vies. Il dit à Kunti :
- Ton fils peut me répondre : que m'importe la terre ? Que m'importent le plaisir et la vie ?
- Réponds - lui qu'il n'est pas seul. Toutes les créatures vivent autour de lui, à cause de lui. S'il manque de fermeté, le malheur, son adversaire, s'enrichira de sa faiblesse.
- Et s'il te dit : tu as fermé ton coeur à la pitié ?
- La douceur est amère et impuissante. Qu'il se façonne un coeur de fer, car la pitié est un poison.
- Et mon corps ? J'ai de la tendresse pour mon corps...
- Je dirai à mon fils : ton corps est beau, ton corps est admirable, mais si tu as peur de la mort, pourquoi as-tu reçu la vie ? Brûle comme une torche, ne serait-ce qu'un instant, cela vaut mieux qu'une longue fumée."